Burkhalter: Alléger l’humanité de ses souffrances indicibles»

«Alléger l’humanité de ses souffrances indicibles: par la politique de paix et de sécurité, par l’action et le droit humanitaires» (de/fr)

L’aide humanitaire est une affaire de cœur: elle est au cœur des valeurs de notre pays; elle est au cœur de votre engagement, de votre travail; elle est en plein cœur de cette journée qui nous rassemble.

Et ce cœur saigne en pensant aux terribles conflits actuels, tout particulièrement le conflit syrien. Ce qui se passe en Syrie est indicible comme les souffrances: la plus grande catastrophe humanitaire depuis la seconde guerre mondiale.

Tant de morts, tant de personnes qui souffrent, qui ont dû fuir; tant de vies qui dépendent d’une aide d’urgence, dont celles d’enfants par millions. L’espérance de vie y a chuté de vingt ans, comme si l’on avait effacé une génération entière d’un gigantesque coup d’épée…

Les battements de notre cœur devant ces souffrances ne doivent pas nous empêcher de prendre la mesure des réalités. Si l’engagement politique est aussi une affaire de cœur, il doit toujours se faire en regardant les réalités en face.

Les rivalités régionales et les intérêts contradictoires des puissances bloquent toute solution politique depuis des années. Il faut donc redoubler d’efforts pour pousser à un processus politique, tel que décrit par deux fois à Genève.

Un processus qui, seul, permettra de sortir ce pays et ses population durablement de l’abîme.

L’aide humanitaire apportée aux personnes en détresse en Syrie et en Irak est plus importante que jamais. Pourtant elle ne saurait remplacer la volonté politique de résoudre ce conflit.

Les puissances et en particulier les membres du Conseil de sécurité ont le devoir de se mobiliser sur ce dossier et d’aboutir, enfin, à un tel processus. Ils le doivent aux habitants de cette région et à l’idée même d’humanité, qui est au cœur de la Charte des Nations Unies.

Les conflits qui déchirent la République centrafricaine, le Soudan du Sud et l’Ukraine, de même que l’instabilité du Sahel sont, eux aussi, des sources d’indicibles souffrances.

Et de nouvelles tensions apparaissent: on assiste à une escalade de la violence au Yémen – pays le plus pauvre de la péninsule arabique. Déjà 16 millions d’hommes, de femmes et d’enfants y ont besoin d’assistance. A cela s’ajoutent une crise économique et une crise des ressources en eau.

A cela s’ajoutent aussi les catastrophes naturelles qui frappent l’humanité de plus en plus intensément: plus de 20 millions de personnes doivent fuir leur maison en raison du changement climatique.

La violence, d’un côté, et la misère, de l’autre, jettent ainsi plus de 55 millions de personnes sur les routes de l’exil. C’est l’équivalent de sept fois la Suisse: «sept Suisses» en perdition de par le monde… C’est aussi une dimension qui n’avait plus été atteinte depuis la Seconde Guerre mondiale. C’est enfin l’objet d’une grande tristesse – celle de notre humanité de plus en plus blessée – et d’une grande inquiétude – celle de notre système humanitaire mondial dont on se demande s’il est capable de tenir une telle série de chocs brutaux.

Et la Suisse dans tout cela? La Suisse fait front. Elle dispose d’une vaste palette d’instruments éprouvés et reconnus à l’échelle internationale: dans la prévention des catastrophes, dans la promotion de la paix et du dialogue. Par ce savoir-faire quasiment traditionnel, par son image et sa réalité, la Suisse peut réduire le potentiel des besoins humanitaires avant qu’ils n’apparaissent; elle peut renforcer la sécurité des pays et celle des individus.

Cette journée annuelle est précisément placée sous le thème de la prévention des catastrophes, qui est une réelle priorité de notre action.

On vient de voir ensemble un film qui l’a illustré avec force: par des mécanismes de réaction et par des mesures visant à éviter des dommages futurs, nous réduisons concrètement les risques de catastrophes. Pour les êtres humains, pour les sociétés dans leur ensemble. Mieux vaut prévenir que guérir!

Le cœur, donc et à nouveau! Mais aussi la raison: la prévention permet aussi de réduire les pertes économiques. L’ONU estime les dommages causés par les catastrophes naturelles à 300 milliards de francs par an, et la tendance est à la hausse. Trois cents milliards: c’est au moins cent fois plus que l’aide internationale de la Suisse…

La prévention coûte bien moins cher que la reconstruction. Selon la Banque mondiale, chaque franc investi dans la prévention permet, à terme, d’économiser jusqu’à sept francs: un taux qui donne le change et un franc particulièrement fort, puisqu’il en vaut sept! Ces investissements permettent d’innover, de créer de la croissance et des emplois. La prévention contribue donc à la sécurité et à la prospérité. A l’avenir, tout simplement.

De plus, la prévention des catastrophes est essentielle pour sécuriser les résultats de la coopération au développement.

Les pays industrialisés ne sont pas à l’abri non plus. Il y a deux semaines, toute une «équipe suisse» était à Sendai, à la Conférence des Nations Unies sur la réduction des risques de catastrophes. Sendai, l’une des nombreuses cités du Japon, l’un des pays les plus riches et développés au monde.

Sendai, une ville qui vit au rythme de l’océan tout proche; et qui l’a payé très cher il y a tout juste quatre ans: une catastrophe prenant la forme d’une vague, interminable et dévastatrice, fauchant la vie de milliers de personnes ainsi qu’une centrale nucléaire au nom désormais mondialement connu de Fukushima. Les dommages économiques, eux, s’élèvent à 260 milliards de dollars. Cette catastrophe devient la plus onéreuse de tous les temps.

Mais si les pays industrialisés peuvent être ainsi fortement touchés, ce sont pourtant souvent les pays les moins développés – les moins solides – qui sont le plus durement frappés par des phénomènes tels que les inondations, les sécheresses, les séismes ou les cyclones.

Les catastrophes stoppent des vies et freinent le développement. Elles peuvent réduire à néant des années d’efforts. Les efforts de populations pauvres, vulnérables. Je viens de rendre visite à un village à Jaffna, au nord du Sri Lanka. C’est une grande émotion d’entrer dans une maison reconstruite après des années de guerre et un tsunami.

En Haïti, le séisme qui a dévasté l’île en 2010 a fait remonter le nombre de ménages vivant en-dessous du seuil de pauvreté au niveau de 2001. Dix ans de perdus en une seule journée!

C’est pourquoi la Suisse a voulu initier un changement de paradigme face aux catastrophes naturelles: agir plutôt que seulement réagir; prévenir plutôt que seulement guérir.

Car, à l’avenir, les risques naturels vont s’intensifier du fait de la croissance démographique, d’une urbanisation soutenue, de la dégradation de l’environnement et du changement climatique.

D’ailleurs, notre planète semble nous lancer des signes: alors même que les nations étaient réunies à Sendai – sur le littoral du Pacifique nord – pour négocier un cadre de réduction des risques de catastrophes, l’une des pires tempêtes tropicales de l’histoire semait la désolation à plus de 300km/h à Vanuatu, dans le Pacifique Sud!

Plus des articles, qui vous pouviez interessé:

Jahrestagung der Humanitären Hilfe zur Katastrophenvorsorge

Burkhalters Rede a. d. Jahrestagung der Humanitären Hilfe des Bundes

Zweiter Bericht zur rassistischen Diskriminierung in der Schweiz

EKR – Die Schweiz engagiert sich im Kampf gegen Rassismus

Kompetenz zum Abschluss völkerrechtlicher Verträge ändert sich

Schweizer Beitrag für das IKRK beträgt rund 80 Mio. Franken

 

LInks zu weiteren Specials und Dossiers

NGO-Radar | Datenschutz-Dossier | (A-)Soziales im Inland | Klima & Umwelt-Dossier


Dieser Beitrag wurde am von unter News veröffentlicht.

Über gmc

1992 gründete der Zürcher Fotojournalist Gerd Müller die Presse- und Bildagentur GMC Photopress und reiste hernach als Agenturfotograf und Fotojournalist in über 80 Länder. Seine Reportagen wurden in zahlreichen Reise- und Spa-Magazinen publiziert. 2021 publizierte er Auszüge aus seinem Buch Highlights of a wild life -Metamorphosen politischer und ökologischer Natur.

Schreibe einen Kommentar